Bien que la tradition populaire locale ait longtemps daté l'exploitation de la mine de plomb argentifère d'Alligny-en-Morvan de l'époque gallo-romaine, les
historiens en attribuent aujourd'hui la découverte au sieur Gaspard
Quarré d'Alligny, seigneur du village en 1640.
Ce dernier tente l'exploitation de la
mine, mais après y avoir investi 1200 livres il n'en n'en retire qu'un lingot d'argent valant 50 écus, soit seulement 150 livres... Plus tard Jean Lombard, premier
fondeur de canons de la province du Nivernais, peut exploiter sur autorisation de Louis XV la mine d'Alligny de 1734 à 1742, avant de l'abandonner . L'activité est alors reprise par l'inspecteur des mines Paulin du Boulet, mais là encore, la rentabilité n'est pas au rendez-vous .
Maret, duc de Bassano, la rouvre autour de 1855, mais
l'extraction manuelle du minerai reste longue et difficile et son transport très cher : il faut conduire le minerai brut en chars à boeufs jusqu'à
Chagny pour le transborder sur le canal du Centre. Le duc de Bassano se limite à l'exploitation les parties accessibles avant de stopper l'extraction. Le terrain dit "champ de la mine" est alors vendu et converti à l'agriculture.
En 1910, un groupement de petits investisseurs locaux, reprend l'idée, et en 1912, la montagne est creusée d'est en ouest et la nouvelle installation minière (telle que sur la photo) est bénite par l'abbé Charrault,
curé d'Alligny. Mais la guerre de 14-18 arrive et faute de main d'oeuvre et de matériel il faut encore une fois suspendre l'activité: on noie la mine pendant 5 ans.
En 1919, la guerre est finie, mais l'ancienne société n'a plus les fonds nécessaires pour sa remise en état des installations; on doit les céder à un
consortium :les Dubonnet, qui exploitent la mine jusqu'en 1928 en engageant des travaux d'ampleur. Une ligne à haute
tension vient alimenter la mine en électricité et un embranchement particulier est implanté sur la ligne de chemine de fer du "Tacot" qui relie Nevers à Saulieu. L'usine est modernisée pour pouvoir broyer et concasser sur place le minerai de plomb, qui est séparé de sa
gangue de baryte, et trié pour la fonderie par une "laverie". Des moulins et des fours traitent aussi cette baryte qui peut être fournie directement à ses utilisateurs pour la production de différents produits chimiques, peintures, mastics, isolants , disques de gramophone... Des spécialistes pensent d'ailleurs que la revente de la baryte triée peut à elle seule absorber toutes les charges d'exploitation de la mine.
En 1928, les Dubonnet cèdent l'affaire à la Société Minière de France.
La mine compte alors plus d'une centaine d'ouvriers au fond et à la surface, supervisés par quelques cadres formés d'abord localement. Plusieurs dizaines d'ouvriers étrangers sous contrat y travaillent périodiquement:
Italiens , Polonais, Yougoslaves, Espagnols, Marocains. pour lesquels on construit à proximité une cité ouvrière, avec 7 bâtiments en bois, dont l'un de 40 m sur 12 et un autre de 32 m sur 10, avec leur toit en ardoises et en "everite" ' ( c'est à dire du fibrociment bien amianté...)
En 1929, le puits central de la mine a 115 m de profondeur. De là partent plusieurs galeries d'une longueur totale de 4,5 km. Le puits est
couronné par un chevalement métallique de 17 m de hauteur, muni des équipements de sécurité des mines: cage à double compartiment, étagée avec parachute, treuil électrique... "
Pendant les années 1928-1929, pendant les
travaux d'aménagement, 3 tonnes de plomb sortent par jour, triées et prêtes à être fondues. Quand à l'argent, on en extrait , selon les endroit, de 0,200 à 3 kg par tonne de
plomb.
Au début de 1930, au moment où la mine, bien aménagée, commence à atteindre son meilleur rendement, c'est la crise: le cours mondial des métaux s'effondre. La Direction de la compagnie par ailleurs engagée dans des placements peu sûrs hésite... avant de décider la fermeture, qui sera celle-là définitive. La mine est de nouveau noyée, probablement avec une bonne partie du matériel ( rails , tuyaux, wagonnets...) L'ensemble est adjugé en trois lots pour la somme totale de seulement 171 832 Fr ( la mine et ses travaux avait coûté plusieurs millions de francs de l'époque ) . K. Nibling, entrepreneur de travaux publics, rachète les terrains et se sert d'une partie des
galeries pour entreposer des explosifs. En 1959,il exploite encore les sables provenant des "laveries" du minerai.